Instance de consultation
Département fédéral des finances (DFF)
Délai de réponse
Le 5 mai 2025
Objet
Avant-projet de loi fédérale sur le programme d’allègement budgétaire 2027
Contexte
Le déséquilibre budgétaire menace. Les dépenses augmentant dès lors nettement plus vite que les recettes, les exigences constitutionnelles du frein à l’endettement ne seront plus respectées si aucune mesure n’est prise. Par conséquent, la planification financière actuelle prévoit que des corrections importantes pouvant aller jusqu’à 3 milliards de francs par an s’imposeront à partir de 2027. Dans le programme d’allégement budgétaire 2027, le Conseil fédéral propose des mesures permettant de réduire la croissance des dépenses et de rétablir l’équilibre budgétaire.
Notre prise de position en bref
Parmi les points positifs, la CCI Valais
- Reste très attachée au principe du double frein aux dépenses et à l’endettement et salue sa mise en oeuvre dans le programme proposé.
- Soutient sans réserve un équilibrage du budget fédéral par ciblage des dépenses.
- Apprécie la réflexion menée sur les effets d’aubaine qui découlent des subventions fédérales. Pareil examen devrait par ailleurs devenir un exercice régulier.
- Apprécie que le paquet soit proposé sous la forme d’un acte modificateur unique, qui permet une bonne vue d’ensemble des enjeux.
En revanche, notre association
- Rejette catégoriquement l’augmentation de la fiscalité de la prévoyance professionnelle.
- Regrette que plusieurs mesures assimilent des investissements importants, tant dans le capital humain que physique, à des coûts.
- Met en garde contre un report excessif de charges vers les cantons et les communes, surtout en ce qui concerne les dépenses liées qui ne leur laissent aucune marge de manoeuvre.
- Estime que trop peu d’attention a été portés aux nécessaires gains en efficacité et en productivité de l’administration fédérale.
- Estime que le programme cible davantage des réductions de moyens alloué à des tâches, plutôt que des abandons de tâches obsolètes.
- Constate que l’administration fédérale s’est largement exemptée de son propre principe de « symétrie des sacrifices ».
- Regrette que les domaines militaires et de la prévoyance sociale n’ait pas fait l’objet d’un examen et d’une priorisation des tâches, ni de l’efficience des mesures.
Notre prise de position en détails :
Des finances fédérales saines
Une politique financière durable et des finances fédérales solides constituent les fondements essentiels du bon fonctionnement de l’Etat. Il est crucial de respecter le frein à l’endettement, en tant que principe inscrit dans la Constitution, tant dans la planification financière que dans la gestion des dépenses publiques. Ce respect permet d’assurer, sur le long terme, non seulement la réalisation des missions fondamentales de l’État, mais aussi d’asseoir la crédibilité de notre système politique, financier et économique. Nous saluons la mise en oeuvre du double frein aux dépenses et à l’endettement par le programme d’allégement présenté, et apprécions les efforts du Conseil fédéral en vue de le respecter.
Rappelons ici que ce sont avant tout les intérêts des contribuables qui doivent être protégés. Le jeu politique et son horizon à 4 ans notoirement prompt à la myopie pousse naturellement les dépenses vers le haut, espérant passer la note à celles et ceux qui payent des impôts au présent ou au futur. Cibler le programme sur les dépenses répond tout à fait à ce critère.
Il est aussi juste de notre point de vue de financer les nombreuses dépenses acceptées ces dernières années au Parlement par des gains en efficience et l’abandon de tâches obsolètes. Un examen rigoureux des effets d’aubaine induits par les subventions fédérales est plus que bienvenu, et devrait même être répété à intervalles plus régulier à l’avenir. De ce point de vue nous regrettons l’opportunité manquée de puiser davantage dans l’important potentiel de productivité encore à réaliser par l’administration fédérale.
Pas de hausse d’impôts, ni de coupes pénalisant l’avenir
Parmi toutes les mesures proposées, seule une poignée concrétise des revenus supplémentaires pour la Confédération et les cantons. Nous rejetons catégoriquement les hausses d’impôts proposées sur les retraits en capital des 2e et 3e piliers. (1) Elles nous apparaissent comme une punition lourde et injustifiée de la classe moyenne, ainsi que des personnes malades ou invalides1. Les salariés épargnent tout au long de leur vie active dans les 2e et 3e piliers. Modifier les règles en cours de route par des hausses d’impôts viole le principe de la bonne foi et nous est inacceptable.
Certaines mesures de réduction de coûts réduisent hélas notre capacité d’investissement dans le capital humain, en particulier dans la formation, la recherche et l’innovation. Ces coupes entraîneront des conséquences négatives sur la compétitivité de la Suisse à long terme. Par exemple, si elle n’est pas compensée, la baisse du financement fédéral ne permettra pas aux hautes écoles de faire face à la hausse du nombre d’étudiants attendue et de répondre aux besoins en main-d’oeuvre qualifiée exprimés par l’économie.
La Suisse est reconnue pour l’excellence de sa recherche et de son innovation. Réduire les financements dédiés mettrait en péril notre position de leader et limiterait les collaborations avec le monde économique, en particulier pour les PME et les start-ups. En Valais, les coupes toucheraient particulièrement les projets de recherche appliquée, qui bénéficient directement aux entreprises, et mettraient à mal les efforts entrepris pour favoriser des secteurs clés tels que la transition énergétique, l’innovation touristique ou la recherche environnementale.
Pas de transfert de charges vers les cantons
Les mesures d'économie de la Confédération ne doivent pas non plus entraîner un transfert de charges vers les cantons et les communes. C'est le budget fédéral qui nécessite des mesures correctives, et non les budgets cantonaux ou communaux. Les transferts de charges vers les cantons affectent en outre en particulier ceux à faible potentiel de ressources, qui n'ont aucune marge de manoeuvre.
Il faut donc refuser les transferts de charges vers les cantons, en particulier lorsqu’ils concernent des dépenses liées qui ne leur laisse aucune latitude. Une éventuelle nouvelle répartition des tâches entre la Confédération et les cantons devrait être effectuée à part, en respectant le principe selon lequel le niveau étatique qui finance principalement une tâche peut également en décider la conception.
Examen et appréciation des mesures
La CCI Valais est consciente de l’effort collectif à fournir pour réussir cet exercice d’assainissement des finances fédérales. Toutes les mesures n’ont pas le même poids et présentent un profil de coûts/bénéfices très inégal. Notre association peut se ranger derrière la majorité d’entre elles, tout en souhaitant une atténuation des mesures qui impactent la formation, la recherche et l’innovation.
Cependant un certain nombre d’entre elles ne peuvent trouver grâce à nos yeux. Celles-ci se retrouvent dans l’une de ces trois catégories :
- Celles qui réduisent ou suppriment des tâches régaliennes de l’Etat, qui entraînent des conséquences concrètes et disproportionnées sur les populations des cantons alpins ou qui pénalisent les régions périphériques, dans les domaines des dangers naturels, de la protection des forêts, de la sécurité des infrastructures et de la couverture en route et en transports publics :
- 1.5.13 - Réduction des contributions pour les routes principales - REJET
- 1.5.14 - FORTA : réduction des apports - REJET
- 1.5.15 - Augmentation du degré de couverture des coûts dans le transport régional de voyageurs - REJET
- 1.5.16 - Réduction des contributions pour les tâches communes dans le domaine de l’environnement - REJET des coupes dans les dangers naturels
- 2.13 - Suppression de la contribution à la diffusion de programmes dans les régions de montagne - REJET
- 2.19 - FIF : réduction des apports - REJET
- 2.23 - Réduction des contributions routières générales - REJET
- 2.24 - Réduction des contributions aux aéroports régionaux dans une mesure adaptée aux intérêts de la Confédération - REJET
- 2.25 - OFEV : suppression du soutien aux installations pilotes et de démonstration - REJET
- 2.33 - Politique régionale : renonciation à des apports supplémentaires au fonds et à des allégements fiscaux - REJET
- 2.34 - Réduction de la compensation des charges dues à des facteurs socio-démographiques - REJET
- 2.36 - Modification de la Loi sur les subventions - REJET
2. Celles qui réduisent ou suppriment des moyens de soutien économique aux régions structurellement faibles (tourisme, innovation, agriculture, etc.) :
- 1.5.8 - Réduction de la contribution fédérale au FNS - REJET
- 2.29 - Augmentation des mises aux enchères de contingents tarifaires - REJET
- 2.30 - Réduction à 50 % du taux des contributions à la qualité du paysage - REJET
3. Celles qui reportent des charges liées trop importantes sur les cantons et les communes ( par exemple dans le domaine de l’asile) voire sur les citoyens et les administrés :
- 2.15 - Désenchevêtrement des dépenses entre la Confédération et l’AVS - REJET
- 2.17 - Limitation à 4 ans de l’obligation de verser des forfaits globaux à titre d’indemnisation - REJET
- 2.31 - Redéfinition des priorités de subventionnement dans le domaine de la politique climatique - REJET
- 2.35 - Augmentation de l’impôt sur les retraits en capital des 2e et 3e piliers - REJET
Pas de rigidité excessive dans la Loi sur les subventions
La modification de la Loi sur les subventions vise à ancrer le principe selon lequel les aides financières de la Confédération ne doivent généralement pas représenter plus de 50 % des coûts. Bien que ce principe soit compréhensible, des taux de contribution plus élevés peuvent tout à fait être justifiés dans certains domaines. Par exemple, pareils taux ont été accordés pour faire face aux conséquences de la crise du Covid. Ils sont également justifiés tant pour les domaines de compétence exclusive de la Confédération, tant pour des projets internationaux, afin que les partenaires suisses du projet bénéficient de conditions comparables à celles des concurrents étrangers. Nous proposons d’éviter d’introduire cette rigidité excessive et de renoncer à la fixation forfaitaire de la limite de 50 %.
1 Ces hausses concernent également, par exemple, les versements de la Fondation suisse pour paraplégiques aux personnes atteintes de paralysie médullaire, ainsi que les prestations des caisses de pension versées aux conjoints survivants. Ces effets sur les cas d’invalidité et de décès ne sont pas mentionnés dans le rapport explicatif.